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Il fallait vérifier s’il n’y avait pas u Il fallait vérifier s’il n’y avait pas un autre chemin

Un propriétaire a réclamé une servitude légale de passage chez son voisin, pour désenclaver sa parcelle. Problème : son terrain disposait d’un autre moyen pour accéder à la voie publique. Sa demande a été rejetée.

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L’histoire. Il y a, à travers la jurisprudence rurale de la Cour de cassation, une multiplication des contentieux relatifs à l’enclave. Au temps des vastes domaines, le phénomène se produisait plus rarement… Serait-ce que les rapports entre les propriétaires de terres voisines se soient modifiés ? Pour faciliter l’accès à ses quelques centaines de mètres carrés, Bernardin réclamait un passage à son voisin, Constantin. Il n’en avait pas vraiment besoin, mais il considérait cela comme une augmentation de valeur de son bien. Il s’agissait, dans ce cas, de ce que l’on appelle un désenclavement contractuel. Les parties ont, dans l’acte, précisé et décrit comment s’exercerait cette servitude.

Parallèlement, la loi prévoit la possibilité d’obtenir en justice le désenclavement de sa propriété, à condition que le demandeur n’ait aucune autre issue sur la voie publique, et cette servitude résultant d’un jugement s’éteint si l’enclave disparaît (articles 682 et suivants du code civil). On remarque que cette servitude de désenclavement ne s’acquiert pas par prescription trentenaire. En outre, se pose un problème : si l’enclave résulte de la division d’un fonds par suite d’une vente, d’un échange, d’un partage ou de tout autre contrat, le passage ne peut être demandé que sur les terrains qui ont fait l’objet de ces actes (article 684 du code civil). Et c’est autant qu’il est possible matériellement de localiser la servitude sur les terrains ayant appartenu au même propriétaire.

 

Le contentieux. Le propriétaire choisi par Bernardin pour obtenir le désenclavement avait opté pour une parcelle le séparant de la route. Changeant son fusil d’épaule, il a engagé un procès devant le tribunal de grande instance pour faire reconnaître une servitude légale de passage.

Devant la cour d’appel, les juges ont constaté sur la feuille cadastrale que les parcelles de Bernardin et Constantin étaient voisines et se touchaient. Ils ont donc admis l’application de l’article 682 du code civil. La Cour de cassation a censuré cette décision : il fallait rechercher si le terrain de Bernardin ne disposait pas d’un autre accès pour pénétrer sur son bien. C’était le point essentiel ! Même si cet accès était difficile, c’était à lui de l’entretenir.

Nous ignorons le sort que la cour de renvoi donnera à cet argument, mais elle pourra difficilement le rejeter, car l’article 682 mentionne bien « le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n’a sur la voie publique aucune issue ».

 

L’épilogue. Cet arrêt aurait été différent s’il s’était agi d’une servitude conventionnelle. On aurait même pu y trouver tous les vices que l’on rencontre dans les contrats, ne serait-ce que la capacité de celui consentant la servitude... Il est un problème particulier à la servitude légale : lorsque l’on impose à un propriétaire de supporter, en tant que fonds servant, au profit d’un autre propriétaire, le fonds dominant, une servitude de passage, son indemnisation est prévue, mais elle sera différente si le fonds dominant n’a que le droit d’utiliser un chemin existant chez le voisin, ou s’il faut des terrassements neutralisant l’emplacement destiné au passage.

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